Bien que Monsieur Mario Monti affirmait, il y a quelques jours, que "l'Europe n'a plus à avoir peur de l'Italie" (Le Figaro daté du 4 janvier), le pays inquiète encore les marchés.
En effet, l'Italie sera le plus gros émetteur de la zone euro cette année. Elle va devoir rembourser 254 milliards d'euros au cours des 12 prochains mois, avec de grosses échéances dès le mois de février (46 milliards). Pour les analystes, le pays ne pourra pas indéfiniment se financer à des taux aussi élevés. En 2012, l'Italie entrera en récession avec un chômage officiel à 8,5% de la population active, mais en réalité supérieur à 12% selon le Hors-série des Echos de Janvier 2012.
Tout d'abord, le cas de l'Italie reste fondamentalement différent de celui de la France pour une grande raison : il ne s'agit pas d'un gouvernement élu par le peuple mais il s'agit d'un gouvernement mis en place dans l'urgence suite à la non-responsabilité de Berlusconi vis à vis, notamment, de la crise de la dette. A l'époque, il niait l'existence de la crise et préparait des baisses d'impôts. Le 8 Novembre, Silvio Berlusconi est mis en minorité lors de la validation des comptes 2010 de la Nation. Il annonce alors sa démission. Mario Monti, ancien commissaire européen a donc été nommé le 13 Novembre 2011 par le président italien Giorgio Napolitano dans le but d'assainir rapidement la situation financière du pays. Ce dernier, n'a d'ailleurs eu d'autre choix que de monter un troisième plan de rigueur de 30 milliards d'euros (la rédaction des deux premiers plans de rigueur avaient été imposée à Berlusconi) pour tenir l'objectif d'équilibre des finances publiques.
Le Figaro publiait ce 4 janvier une interview intéressante du premier ministre italien qui s'exprimait sur les causes ayant pu engendrer la crise de la dette actuelle. Monsieur Monti y explique que les marchés n'ont commencé à attaquer l'économie italienne que vers la moitié de l'année 2011, autrement dit plus tardivement que dans certains autres pays européens. D'autre part, l'Italie disposait, à cette période, d'indices économiques relativement bons : les ménages italiens ont un taux d'épargne réelle très élevé et ont peu recours à l'endettement, l'Italie n'a pas connu de grand boom immobilier comme en Espagne ou en Irlande et son secteur bancaire s'est tenu à l'écart des opérations financières ayant affecté le monde anglo-saxon. Dans cette interview, Monsieur Monti évoque en fait deux raisons principales à la crise, deux raisons d'ordre politique. Tout d'abord, durant cette période, la majorité au pouvoir avait remis en question sa politique d'austérité budgétaire après des élections régionales mauvaises pour elle en mai, ce qui avait déja déstabilisé les marchés. L'autre raison serait liée au fait que le gouvernement précédent n'ait pas voulu admettre la grave insuffisance de la croissance et qu'il ait négligé les politiques de libéralisation qui auraient pu remédier à cette carence.
Quoi qu'il en soit, aujourd'hui l'Italie est en train de retrouver une légitimité sur la scène européenne. La politique engagée par Mario Monti confère une réelle crédibilité au pays. L'Italie commence à s'imposer, de plus en plus, comme un partenaire de choix vis à vis des autres pays européens afin de ne plus être perçue comme un pays faible duquel il faudrait se méfier. Il est vrai que, contrairement au gouvernement précèdent, Monsieur Monti est très axé sur la dimension européenne ; ce qui n'est pas nouveau puisque nous avions déja, dans les années 50 et notamment lors de la création de l'Europe, une Italie très européiste et favorable à un cadre multinational. Ces jours-ci, nous pourrions presque parler de la reconstitution d'un triangle de décision au sein de l'Union européenne ; formé par l'Allemagne, la France et l'Italie. Pour preuve, le 20 Janvier aura lieu une réunion à Rome (la trilaterale di Roma) qui portera notamment sur les modalités du nouveau fonds de soutien : l'ESM et qui réunira les trois chefs d'Etat leader au sein de l'Europe : Angela Merkel, Nicolas Sarkozy et Mario Monti.
Actuellement, concernant la crise, le gouvernement italien doit affronter deux grandes problématiques. La première étant la formulation du nouveau Traité sur l'Union économique renforcée. L'enjeu étant de fixer les règles d'une politique budgétaire plus stricte sans pour autant couler l'économie du pays et, ainsi, ne pas reproduire la même situation qu'en Grèce. Le deuxième défi concerne les marchés. Il est urgent que l'Europe leur offre des garanties quand à la stabilité de l'Euro, de façon à ce que des capitaux soient, à nouveau, investis en Italie ; ce qui réduirait le "spread", c'est à dire l'écart ou le différentiel entre deux taux, et offrirait un nouveau souffle aux entreprises italiennes.
Il reste néanmoins certain que le système italien souffre de rigidité. Au niveau de l'emploi, par exemple. Le marché du travail y serait plus rigide que dans les autres pays européens, notamment en matière de rupture du contrat de travail. C'est ce qui ressort d'une étude réalisée par le syndicat Confindustria (Confédération générale de l'industrie italienne) et présentée au ministre du travail italien, Elsa Fornero (La Repubblica, 12 Gennaio 2012). Le dossier souligne également que les ressources engagées en matière de création d'emploi sont bien insuffisantes.